Quand on s’approche du déroulement concret de la « Stratégie Française d’Intégration des Rroms », « Une Place Egale dans la Société Française », on comprend que c’est surtout l’égalité devant l’arbitraire de quelques fondés de pouvoir.
Été 2013. Une réunion se tient discrètement dans une sous-préfecture de la région. Autour de la table, que du beau monde : le sous-préfet, un adjoint du maire de la commune concernée, un commissaire de la Police aux Frontières, une équipe de conseillers du président de l’intercommunalité, des membres du Conseil général, et des représentants du milieu associatif institutionnel. Au menu du jour, l’avenir de vingt-et-unes familles rroms migrantes de Roumanie installées sur un terrain de la commune depuis trois ans.

À l’heure des mobilisations contre la loi Vidal et la sélection à l'entrée de l'université, les étudiant.es exilé.es connaissent déjà des logiques de tri et se heurtent à de nombreux obstacles. Au lieu d’apporter son soutien à ses étudiant.es, quel que soit leur statut, l’Université de Lille, épaulée par la préfecture, renforce les inégalités entre les étranger.ères qu'elle accueille en se focalisant sur un programme d’exception.
Présenté en conseil des ministres le 21 février 2018 par Gérard Collomb, le projet de loi « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif » a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 23 avril. Il sera discuté au Sénat en juin. Il affaiblit la garantie des droits fondamentaux pour les exilé.es et accentue encore la maltraitance institutionnelle.
2 Septembre 1939 : l'ordre de mobilisation générale appelle les patriotes à une énième boucherie à la gloire de la religion drapeautique. Ah ça, quand il faut sonner le clairon, nos dirigeants va-t'en guerre répondent toujours « présents ! » Quand il s'agit d'aller crever dans une tranchée par contre y'a plus personne, si ce n'est les prolos et les troupes coloniales ! Aujourd’hui, les descendant.es des tirailleurs africains vivent avec bien peu d’informations sur le parcours de leurs ancêtres. Lorsque Bouchra se met en tête de retrouver la trace de son arrière-grand-père, elle découvre comment l’État français profite de l’oubli des familles pour économiser sur l’entretien des tombes d’anciens combattants.
Le 24 octobre, les flics évacuaient le camp de réfugié.es de la friche Saint-Sauveur. Troisième fois en un an que la préfecture disperse les exilé.es pour mieux les contrôler et les invisibiliser. Alors que les discours et les méthodes se durcissent, le mouvement de solidarité, lui, se renforce.
Depuis l'été dernier, les jeunes mineurs isolés ont installé leurs tentes sur la friche de l'ancienne gare Saint Sauveur. Leurs conditions de vie sont loin des préoccupations de la mairie. Martine Aubry n'hésite pas à noyer le poisson, à fuir ses responsabilités. Sans pudeur, elle se défausse et délègue aux associatifs le soin d'apporter le minimum vital. Une action entravée par la ville qui excelle dans sa chasse aux moindres refuges de fortune. Invisibiliser des jeunes, étouffer la contestation et réprimer toute forme de lutte, voilà la stratégie pour régler un « problème » qui traîne.
Les mineurs isolés étrangers de Lille continuent de survivre et de lutter pour un hébergement et une scolarisation. Des dizaines d'entre eux restent totalement ignorés par le département, dans le mépris le plus total. Début juin, une tentative de réinstallation au parc des Olieux tourne court. La pression policière et des méthodes indignes ont stoppé net leur début d'organisation. Déterminés et épaulés par le collectif des Olieux, les jeunes luttent pour leurs droits et arrachent néanmoins des petites victoires.
Octobre 2016, la destruction du bidonville de Calais et l’expulsion de ses habitant.es se déroulent dans le « calme » sur fond d’état d’urgence et de surenchère électoraliste. Le spectacle « humanitaire » est à son comble, savamment mis en scène par le gouvernement avec le concours d’une foule de journalistes convoquée et accréditée pour l’occasion. Cette destruction est l’épilogue d’une stratégie plus globale déployée depuis plusieurs mois sur le territoire visant à criminaliser les réfugié.es. Les dispositifs territoriaux, juridiques et policiers se referment aujourd’hui sur celles et ceux qui n’ont pas accepté la solution de l’État comme sur tou.tes les autres qui sont monté.es dans les bus à destination des « centres d’accueil et d’orientation » (CAO). Reportage sur les cendres encore fumantes des camps de la lande de Calais.
Le 2 septembre dernier, le tribunal administratif de Lille rejette la demande d’expulsion de la Métropole Européenne de Lille (MEL). Les mineurs isolés du parc des Olieux ont gagné… le droit de rester dehors. Une décision qui ne change rien aux conditions sanitaires déplorables dénoncées par les jeunes et le collectif de soutien. Une cinquantaine de jeunes se sont vus refuser l'accès à l'Aide Médicale d'Etat (AME) par la CPAM. Des décisions qui flirtent avec l'arbitraire et l'illégalité.
Abdellali Hajjat, maître de conférence à l'université de Nanterre, a publié avec Marwann Mohammed, chargé de recherche en sociologie au CNRS, un ouvrage fort bien documenté sur la construction historique par les élites politiques, médiatiques et intellectuelles d'un « problème » musulman. Il revient pour La Brique sur les tenants et aboutissants des discriminations islamophobes.
Le Nord-Pas-de-Calais est une région de passage, de transit. Les flux marchands circulent, toujours plus vite. Pourtant, sur le littoral, l'État bloque des personnes voulant rejoindre le Royaume-Uni, à deux pas. Il n’y a jamais eu autant de flics, d’agents de sécurité, de fachos, de barbelés, de caméras et de morts. Mais face à ça, c’est plus de monde mobilisé que jamais, des forces collectives et de la combativité.
Ils viennent du Congo, de Guinée ou d'autres pays. Ils ont utilisé les même canaux d'arrivée que leurs aînés. Sauf que ces jeunes sont adolescents et débarquent seuls en France. Leur arrivée n'est que le début d'un long combat pour faire reconnaitre leur qualité de mineur, un statut nécessaire à l'obtention de l'assistance dont ils ont droit et besoin. En attendant, à Lille, et pour beaucoup d'entre eux, c'est la rue et la précarité extrême.
Officiellement, les Pouvoirs publics de la métropole prétendent vouloir intégrer une partie des populations rroms. Dans les faits, ils contribuent à les marginaliser davantage. En cause, la mise en place de « diagnostics sociaux » pour le moins douteux.
Le 24 mai dernier La Brique assiste à une « réunion de rue » organisée à l'appel des militant-es et des activistes de Calais. Il s'agit d'avertir les migrant-es de l'opération sanitaire qui s’apprête à frapper l’ensemble de leurs campements pour, officiellement, mettre fin à une épidémie de gale. Bien loin d’être motivé par des raisons strictement humanitaires, ce plan vise à faire table rase de leurs lieux de vie afin d'invisibiliser leur présence. À l'heure de « la fête de la mer » de la municipalité, il faut nettoyer les berges.



